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Aubonne
au jour le jour: le 15 février, suite du procès contre la
police
Ce matin, ont témoigné : un gendarme
- dont le rôle était d’accueillir et de remercier les
agents durant le G8 - et l'épouse de Poget. Ensuite, les plaignants
ont donné des informations supplémentaires concernant la
nature de l’action.
Puis, l'avocat des plaignants, maître Garbade, a fait sa plaidoirie
à laquelle a répondu le ministère public. L'après-midi
a fait place aux plaidoiries des deux avocats de la défense.
C'est dans une ambiance tout à fait partiale qu' a repris le procès
aujourd'hui. Les policiers qui témoignaient hier à la barre
sont aujourd'hui chargés d'assurer “la sécurité”
du palais de justice. Les forces de l'ordre refusent que le groupe de
soutien attende à l'intérieur du bâtiment et celui-ci
se voit obligé d'attendre plus d'une heure sous la pluie.
Pendant ce temps, madame Poget témoigne que son mari est “un
gendarme jusqu’au fond de son âme (…) très engagé,
perfectionniste, (…) qui ne désobéirait jamais à
un ordre (…) un homme qui a beaucoup de coeur”.
Gesine explique la raison pour laquelle ils ne se sont pas assurés
lors de l’action qui avait pour but de constituer un barrage difficilement
éliminable. Martin quant à lui, a évoqué différentes
actions de ce type qui ont eu lieu en Grande-Bretagne et en Allemagne,
escomptant que les force de l’ordre suisses réagiraient de
manière appropriée.
La plaidoirie de Garbade :
Dans sa plaidoirie, Garbade a mis l’accent sur les nombreuses erreurs
des accusés, inexcusables dans une mission particulière
comme celle-la. Il a rappelé que la police avait pensé à
nier les faits mais que la présence d’une vidéo les
en avait dissuadés, et qu’une cellule psychologique avait
été mise en place immédiatement pour soutenir Deiss,
mais que rien n'a été mis en place pour les manifestants.
Le sergent-major Poget, tout comme son subordonné Deiss, n’ont
pas assumé leurs responsabilités de sécurisation
de l’autoroute et n’ont pas su garder leur sang-froid.
Au niveau de la procédure, il a mis en exergue différentes
failles, comme celle du refus constant durant plus d’une année,
du juge d’instruction d’entendre des manifestants comme témoins.
Par rapport au “dol éventuel”, il regrette que l’instruction
n’ait pas fait plus de prospections (ex: qui entendait-on dans les
transcriptions radio de la police?, à quel moment?, qui a parlé
à Deiss juste avant qu'il ne coupe la corde?, etc.)
Il a mis en doute les nombreuses réactions "instinctives"
des accusés, sensés assurer la sécurité des
automobolistes et des plaignants sur le pont. Il dénonce le fait
que le sergent-major Poget n'ait pas été en mesure de respecter
les ordres reçus, de réfléchir et de garder son sang
froid.
Il a aussi remis en cause la description de la situation comme extrêmement
chaotique pour deux raisons. D'abord parce que la situation était
sous contrôle quand Poget et Deiss sont arrivés. Et d'autre
part, le témoignage du policier K. montrait qu'il avait pu communiquer
de manière calme avec les manifestants.
Le chef d'inculpation de négligence semble par ailleurs tout à
fait pertinent pour un officier qui en plus a besoin de 12 minutes pour
appeler une ambulance (nous ne sommes même pas sûrs que ce
soit lui qui ait téléphoné!).
On continue à mettre la faute sur les victimes de l’accident,
aujourd’hui plaignantes, afin de disculper les accusés.
Plaidoirie du ministère public:
Pour commencer, il a précisé que le débat
est juridique et non politique. “- Dans cette affaire, la responsabilité
de l'Etat n'est pas du tout à la page.”
D'autre part, il s'est tout de suite défendu du mythe de l'impunité
de la police, affirmant qu'au ministère public, les fautes sont
traitées de la même manière quel que soit l'accusé.
Aux vues de sa plaidoirie, nous avons certains doutes là-dessus!
Par exemple, il a particulièrement mis l'accent sur le contexte
stressant du G8, faisant un historique des violents événements
s'étant déroulés aussi bien dans le canton de Vaud
que de Genève durant toute la campagne anti-G8.
Dans le même sens, il semblait chercher à justifier les incompétences
des deux accusés en rappelant leurs différentes “interventions”
cette même matinée, avant d'intervenir sur le pont d'Aubonne.
Pour lui comme pour Poget, la banderolle “Arrêtez-vous sinon
vous tuez deux personnes” n'était pas compréhensible.
Il réfute deux des quatre témoignages d'activistes...et
aucun des policiers (qui tenaient pourtant leur lot de contradictions...).
Il va même jusqu'à insinuer que la responsabilité
de cet accident revient à une activiste, alors que cette dernière
ne pouvait plus sécuriser sa zone, à cause de l'intervention
inconsciente des policiers. Il faut dire cependant que cette activiste
est la première personne à s'être rendu auprès
de Martin.
Tout au long de son discours, il se gargarise sur diverses considérations
par rapport à des négligences qui seraient "objectives"
et d'autres qui seraient "subjectives".
Pour résumer sa plaidoirie, voilà comment le ministère
public justifie son abandon des deux accusations :“dans un monde
idéal, ou confortablement assis dans un fauteuil (il fait ici référence
au visionnage de la vidéo) il y a eu des manquements dont les accusés
doivent avoir conscience, mais il faut se replacer dans le contexte(...)l'accusation
de négligence n'est pas révélante au niveau subjectif.”
Comme le prédisait maître Garbade, l'impunité de
la police est maladroitement cachée derrière des accusations
récurrentes contre les victimes de cette dernière.
Plaidoirie de l'avocat de Poget:
Celle-ci fut laborieuse (au point que l'une des journaliste assoupie
tombe de sa chaise) et empreinte d'une sacrée dose de zèle...
Il a construit toute sa plaidoirie sur le rapport entre la témérité
des manifestants et la volonté sécuritaire des policiers.
Lui aussi base sa défense sur l'accusation des plaignants (qu'il
qualifie de "kamikazes"), les accusant entre autres de ne pas
avoir informé la police au préalable (!) et de s'être
organiser de manière anarchique, "sans chef".
Quand il fait allusion aux banderoles ("ne tirez pas" et "arrêtez-vous,
sinon vous tuez deux personnes"), il regrette aussi leur manque de
clarté et s'offense que l'on puisse soupçonner la police
de tirer. "-Nous ne sommes pas dans un état dictatorial..."
Pourtant, doit-on rappeler les inombrables blessures provoquées
par la police sur des manifestants et des journalistes (manifestations
anti G8, anti WEF, etc...)??
Il semble remettre en question les témoignages des supérieurs
qui indiquent que Poget a outrepassé sa mission en prétextant
que la pression médiatique les a influencés. Il estime aussi
que 2 des témoins à charge ne sont pas crédibles
et considère que le temperamment "bouillonant" de Poget
est une qualité!!!
Il finit sa plaidoirie par ce résumé révélateur:
"- L'accident est dû à la témérité
des manifestants!" inversant ainsi les rôles entre plaignants
et accusés.
Plaidoirie de l'avocat de Deiss:
Il commence par insister aussi sur la témérité des
activistes et ne mâche pas ses mots pour qualifier l'action: "inconscience",
"légereté", "irréflexion", "sans
aucun moyen de sécurité", "amateurisme qui fait
froid dans le dos", "irresponsabilité".
Par contre quand il se réfère aux actes de son client, il
dira: "- C'est un geste qui s'impose à lui", "-
(...) son geste s'inscrit donc complétement dans sa mission".
Soit, il est payé pour minimiser les actes les plus irresponsables
de Deiss, mais de là à les valoriser...!!!
Il défend Deiss en valorisant ses qualités de prise d'initiative
et d'indépendance (l'automonie des gendarmes semble tout à
coup être un prérequis à l'exercice du maintien de
l'ordre?! On outrepasse la hiérarchie, pilier des principes policiers???).
L'autre partie de la plaidoirie se base sur le fait que le couteau ne
fait pas partie du matériel de base de la police vaudoise et schaffousoise.
Selon lui, Deiss a donc pensé résoudre le problème
de ses collègues qui soulevaient la corde en la coupant sans leur
demander leur avis. Compte tenu de sa lecture claire et "logique"
de la situation l'avocat plaide qu'il aurait été stupide
d'attendre un ordre pour réaliser ce geste si évident.
En fin d'audience, maître Garbade reprend la parole en
réponse à l'avocat de Poget:
Il est dangereux de traiter ce cas en ces termes: "- La
police n'est pas coupable car la victime est plus coupable que la police".
Il fait ici allusion aux nombreuses accusations contre les plaignants
durant les différentes plaidoiries. A ce sujet, il rappelle que
si les plaignants ont commis les même fautes, d'une part ils n'avaient
pas les mêmes responsabilités professionnelles que Deiss
et Poget et d'autre part ils ont déjà été
comdamnés pour cette action. Pourquoi donc les policiers ne seraient-ils
pas condamnés à leur tour? D'autant plus que la dite "témérité"
de l'action des plaignants n'a pas causé d'accident alors que l'action
des policiers a failli tuer deux personnes...
Par ailleurs, il met en évidence que l'argumentation selon laquelle
les victimes auraient du culot de porter plainte est perverse (la sécurité
n'est pas valable que pour les innocents!).
Le verdict sera délivré vendredi 17 février
à 11h45 au tribunal d'arrondissement de Nyon, vous êtes invitéEs
à assister à l'audience.
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